X publie son premier rapport de transparence sous l'ère Musk
Ce qu'il révèle sur l'évolution de la plateforme.
Ce 25 septembre marque une étape dans l'histoire mouvementée de X depuis son rachat par Elon Musk en 2022. La plateforme vient de publier son tout premier rapport de transparence sous la nouvelle direction, offrant un aperçu des changements survenus depuis l'acquisition.
Un rapport attendu, mais différent
Avant l'arrivée du milliardaire, Twitter avait l'habitude de publier des rapports de transparence semestriels. Ces documents détaillés (environ 50 pages) couvraient un large éventail de sujets: suppressions de contenu, demandes d'informations gouvernementales, violations des politiques de la plateforme, etc. Le nouveau rapport de X, bien que plus concis (15 pages), aborde des thématiques similaires. Il convient cependant de noter que certaines informations, notamment les requêtes gouvernementales, sont désormais publiées séparément sur le site web de l'entreprise.
Des chiffres qui interpellent
La comparaison directe entre l'ancien format et le nouveau s'avère délicate, car la méthodologie de mesure a évolué. Néanmoins, certains changements significatifs sautent aux yeux:
Volume de signalements: En 2021, 11,6 millions de comptes avaient été signalés. Le nouveau rapport en fait état de plus de 224 millions (concernant à la fois des comptes et des contenus spécifiques).
Actions prises: En 2021, 4,3 millions de comptes avaient fait l'objet d'une action, dont 1,3 million de suspensions. Le rapport 2024 mentionne 5,2 millions de comptes suspendus.
Contenu haineux: C'est peut-être le changement le plus frappant. En 2021, près de la moitié des signalements concernaient du contenu haineux, aboutissant à des actions sur 1 million de comptes. Le nouveau rapport ne fait état que de 2 361 comptes sanctionnés pour ce motif.
Des explications multiples
Comment interpréter ces évolutions ? Plusieurs facteurs entrent en jeu:
Changement de politiques: X a modifié ses règles concernant les discours haineux et la désinformation, notamment autour du Covid-19. Certains contenus autrefois interdits ne sont plus considérés comme problématiques.
Perte d'utilisateurs: Le départ de nombreux utilisateurs depuis le rachat par Elon Musk complique la comparaison des chiffres bruts.
Réduction des effectifs: Les licenciements massifs au sein des équipes de modération et de politique de contenu ont probablement impacté la capacité de la plateforme à traiter les signalements.
Accès restreint aux données: La décision de rendre payant l'accès à l'API a limité la capacité des chercheurs et des ONG à analyser indépendamment l'évolution de X.
Un virage idéologique
L'approche d’Elon Musk, prônant un "absolutisme de la liberté d'expression", a conduit à la réactivation de comptes précédemment bannis pour désinformation ou discours haineux. Cette philosophie s'est parfois heurtée aux exigences légales de certains pays, comme l'illustre le bras de fer avec le Brésil autour de la désinformation électorale. Il est intéressant de noter que la Turquie arrive en tête des pays ayant demandé le retrait de contenus (près de 10 000 requêtes pour début 2024, avec un taux de conformité de 60% de la part de X).
"La transparence est au cœur de ce que nous faisons chez X", affirme Michael Abboud, porte-parole de l'entreprise. Il souligne que ce rapport n'est pas lié aux exigences du Digital Services Act européen, mais reflète "notre désir d'être extrêmement transparents".
Des questions persistent malgré tout quant à la capacité du réseau social à maintenir des systèmes de modération efficaces avec des équipes réduites. La récente annonce de quelques recrutements dans le domaine de la sécurité et de la confiance, à deux mois des élections américaines, semble insuffisante pour reconstituer les effectifs d'antan.
Un rapport révélateur mais incomplet
Ce premier rapport de transparence de l'ère Musk offre un aperçu précieux de l'évolution de X. Il met en lumière des changements dans la gestion de la plateforme, tant au niveau des politiques que des moyens mis en œuvre. Néanmoins, l'analyse fine de ces données reste complexe. Les modifications de méthodologie, la perte d'utilisateurs et les changements de politique rendent difficile une comparaison directe avec le passé. Il n'est aussi qu'une première étape pour comprendre l'impact réel de ces transformations sur l'écosystème de l'information en ligne. Il sera nécessaire de suivre les prochaines publications pour avoir une vision plus complète de la nouvelle identité du réseau social et de son rôle dans le paysage médiatique mondial.